Commentary

Le prix du pouvoir : comment Akere Muna promet les richesses de l’Ambazonie à Yaoundé

Akere Muna n’est pas dépourvu d’intelligence, de crédibilité et de stature internationale. Mais face à la question ambazonienne, il apparaît lié aux mêmes erreurs du passé.

Par Uchiba Nelson, un contributeur de The Independentist

Akere Muna a récemment déclaré aux Camerounais que, s’il devenait président de la République du Cameroun, il pourrait mobiliser 800 milliards de FCFA provenant du pétrole en seulement deux semaines. Une promesse audacieuse, presque magique, mais dont la réalité est inquiétante. La République du Cameroun ne possède qu’environ deux petits champs pétroliers. Le Southern Cameroons (Ambazonie), en revanche, en compte plus de trente-cinq. Alors, de quel pétrole parle vraiment Akere ? Promet-il en silence les ressources de l’Ambazonie à Yaoundé en échange du pouvoir politique ?

Pour les Ambazoniens, ce n’est pas un détail. Le pétrole n’est pas seulement une ressource. C’est le symbole de décennies de pillage et de dépossession. Des milliards ont été détournés du Southern Cameroons pour financer la machine d’oppression qui maintient son peuple enchaîné. Qu’Akere Muna monte sur une tribune nationale et promette ce même pétrole comme s’il lui appartenait — voilà qui blesse profondément.

L’histoire familiale rend cette question encore plus sensible. Son père, Solomon Tandeng Muna, a joué un rôle clé dans le démantèlement de l’autonomie du Southern Cameroons. Président de l’Assemblée du Cameroun occidental, il se tenait aux côtés d’Ahidjo lors du référendum de 1972 qui a dissous la fédération et imposé un État centralisé. Beaucoup d’Ambazoniens le considèrent comme l’un des artisans de la trahison, un homme qui a échangé la liberté de son peuple contre une place à la table de Yaoundé. Lorsque son fils promet aujourd’hui des milliards issus du pétrole, comment ne pas revoir ce passé ? Comme père, comme fils — le schéma semble se répéter.

Pour être juste, Akere Muna a des accomplissements. C’est un avocat reconnu, ancien vice-président de Transparency International, ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, et il s’est bâti une réputation internationale comme défenseur de la transparence. À l’étranger, il est respecté. Au pays, il a osé contester, au moins en apparence, la longue domination de Biya. Pourtant, les contradictions sautent aux yeux. Comment peut-on parler de lutte contre la corruption tout en faisant des promesses fondées sur des richesses volées ? Comment se présenter comme réformateur en continuant de considérer le pétrole ambazonien comme une propriété de Yaoundé ?

Cette question touche aussi à l’identité communautaire. Akere est Meta. Les Ambazoniens se souviennent encore de l’époque où certains commerçants Meta transportaient l’huile de palme de Ngie jusqu’au marché de Tad ou à Bamenda et la rebaptisaient “huile Meta”. Cette habitude d’appropriation et de rebranding n’a pas disparu. Elle se manifeste aujourd’hui en politique — dans l’idée que le pétrole du Southern Cameroons peut être offert à la République du Cameroun sans que son peuple ne soit jamais consulté.

Les questions restent entières. Akere, de quel pétrole parlez-vous ? Avez-vous le droit d’offrir le patrimoine de l’Ambazonie à Yaoundé ? Reconnaîtrez-vous un jour le rôle de votre père dans la liquidation de la fédération et la trahison du Southern Cameroons ? Ou choisirez-vous le même chemin de silence, d’appropriation et de compromis

Akere Muna n’est pas dépourvu d’intelligence, de crédibilité et de stature internationale. Mais face à la question ambazonienne, il apparaît lié aux mêmes erreurs du passé. Offrir le pétrole de l’Ambazonie à la République du Cameroun n’est pas une réforme. C’est une trahison habillée de beaux discours et d’un anglais soigné.

Uchiba Nelson.

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