The Independentist News Blog Editorial Des bulletins sans justice – La vision sélective de la Grande-Bretagne et de la France au Cameroun
Editorial

Des bulletins sans justice – La vision sélective de la Grande-Bretagne et de la France au Cameroun

Les visites diplomatiques à l’ELECAM peuvent améliorer les processus d’inscription des électeurs, mais sans un engagement aussi visible et ferme en faveur des droits humains, de la résolution des conflits et des libertés politiques, elles risquent de n’être que des gestes symboliques.

Par The Independentist desk Éditorial

Le représentant du Haut-Commissariat britannique pour la région du Sud-Ouest vient de visiter les bureaux régionaux d’Elections Cameroon (ELECAM) à Buéa, saluant les préparatifs pour l’élection présidentielle d’octobre. La visite, chaleureusement accueillie par le délégué régional Zoa Michael, a mis en avant les kits biométriques, des chiffres d’inscription dépassant les prévisions et les difficultés logistiques liées à l’organisation des scrutins dans une zone de conflit.

Sur le papier, ce type de déplacement relève de la pratique diplomatique normale. Les missions occidentales affirment souvent vouloir « renforcer les institutions démocratiques » et « promouvoir la transparence » en observant le fonctionnement des organes électoraux. Les partisans de cette approche soutiennent que maintenir un dialogue ouvert avec des institutions comme l’ELECAM peut encourager de meilleures pratiques et identifier des besoins logistiques — surtout dans un climat préélectoral tendu.

Pourtant, cet intérêt officiel contraste fortement avec le silence qui suit des événements bien plus graves. Les massacres, la destruction de villages et le sort de centaines de milliers de déplacés anglophones ne suscitent que rarement des visites ou des déclarations publiques de ces mêmes chancelleries. Ce silence est remarqué — et ressenti comme une blessure — par les communautés qui vivent la crise au quotidien.

Depuis plus de trente ans, la Grande-Bretagne et la France entretiennent des relations cordiales avec le président Paul Biya, le traitant souvent avec la déférence due à un monarque. L’ELECAM elle-même est depuis longtemps considérée par l’opposition et la société civile comme compromise, organisant des élections où la peur, le déplacement forcé et les restrictions de liberté minent toute participation véritable.

La vérité dérangeante est que les gouvernements occidentaux ont également des intérêts économiques profonds au Cameroun — pétrole bon marché, bananes, caoutchouc, bois et gaz naturel — qui pèsent bien plus lourd que le coût politique d’ignorer les violations des droits humains. Si le Royaume-Uni et la France ont fourni une aide humanitaire et soutenu des efforts de médiation par le biais de canaux multilatéraux, ces mesures restent modestes face à leur soutien diplomatique et économique constant au statu quo.

Le rôle de la France est particulièrement enraciné. Ancienne puissance coloniale et principal partenaire sécuritaire, elle a protégé le régime Biya d’un examen international soutenu, même lorsque les preuves d’exactions se sont accumulées. La Grande-Bretagne, de son côté, continue d’intervenir de manière à mettre en avant le fonctionnement institutionnel tout en éludant la question de la violence et de la répression qui l’entourent.

Les visites diplomatiques à l’ELECAM peuvent améliorer les processus d’inscription des électeurs, mais sans un engagement aussi visible et ferme en faveur des droits humains, de la résolution des conflits et des libertés politiques, elles risquent de n’être que des gestes symboliques. La véritable transparence ne consiste pas seulement à compter les électeurs inscrits ; elle consiste à garantir que tous les citoyens — qu’ils se trouvent en ville, dans les camps de réfugiés ou en zone de conflit — puissent participer librement et en toute sécurité. Tant que les partenaires occidentaux n’accorderont pas à la justice la même attention qu’aux bulletins de vote, leur discours sur la démocratie restera creux.

The Independentist desk Éditorial

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